Fleuve Saint-Laurent : du phosphore à l’embouchure de tributaires du lac Saint-Pierre

Le phosphore est abondamment utilisé dans la composition des engrais chimiques. Entraînée par l’érosion et le lessivage des terres agricoles, cette substance chimique se retrouve dans les écosystèmes aquatiques à des concentrations pouvant causer l’eutrophisation du milieu, soit une dégradation par un apport excessif en nutriments (phosphore et azote). Ce phénomène est susceptible de se produire au lac Saint-Pierre, où des affluents majeurs drainent des régions agricoles, soit les rivières Yamaska, Saint-François et Nicolet.

Localisation des stations d'échantillonnage aux embouchures des rivières Yamaska, Saint-François et Nicolet
Localisation des sites d’échantillonnage des rivières Yamaska, Saint-François et Nicolet

Localisation des sites d’échantillonnage des rivières Yamaska, Saint-François et Nicolet Carte localisant les sites d’échantillonnage de la qualité de l’eau à l’embouchure des rivières Yamaska, Saint-François et Nicolet dans leur bassin versant respectif de 4861 kilomètres carrés, de 8994 kilomètres carrés et de 3626 kilomètres carrés. L’occupation du sol à des fins agricoles est illustrée par la couleur orange.

Les symptômes de l’eutrophisation dans un écosystème aquatique sont:

  • la prolifération de macroalgues et du phytoplancton;
  • la diminution de l’oxygène dissous;
  • la réduction et disparition de la végétation submergée;
  • l'apparition de fleurs d’eau nocives ou toxiques;
  • la contamination ou mortalité massive de poissons et de mollusques
Concentrations de phosphore
Milligrammes par litre (mg/L) État
moins de 0,004 Ultra-oligotrophe
0,004-0,010 Oligotrophe
0,010-0,020 Mésotrophe
0,020-0,035 Méso-eutrophe
0,035-0,100 Eutrophe
plus de 0,100 Hypereutrophe

Source : Conseil canadien des ministres de l’environnement, 2007.

Le saviez-vous ? La concentration de phosphore est un indicateur de l’état trophique d’un écosystème. Un milieu aquatique riche en phosphore est considéré comme eutrophe, alors que dans le cas contraire, le milieu est considéré comme oligotrophe.

Concentrations médianes annuelles de phosphore
Concentrations médianes annuelles de phosphore à l’embouchure de tributaires du lac Saint-Pierre 2005-2014

Concentrations médianes annuelles de phosphore à l’embouchure de tributaires du lac Saint-Pierre 2005-2014 Le graphique montre des concentrations médianes de phosphore pour la rivière Yamaska de 0,16 mg/L en 2005, de 0,14 mg/L en 2006, de 0,1 mg/L en 2007, de 0,11 mg/L en 2008, de 0,08 mg/L en 2009, de 0,73 mg/L en 2010, de 0,12 mg/L en 2011, de 0,14 mg/L en 2012, de 0,13 mg/L en 2013 et de 0,11 mg/L en 2014. Dans la rivière Saint-François, ce sont entre 0,2 mg/L et 0,4 mg/L de 2005 à 2014. Dans la rivière Nicolet, ce sont 0,03 mg/L en 2005, 0,07 mg/L en 2006, 0,02 mg/L en 2007, 0,05 mg/L en 2008, 0,04 mg/L en 2009, 0,05 mg/L en 2010 et 2011, 0,07mg/L en 2012, 0,05 mg/L en 2013 et 0,03 mg/L en 2014.

Entre 2005 et 2014, les concentrations médianes de phosphore mesurées à l’embouchure des rivières Saint-François et Nicolet oscillaient autour des valeurs correspondant à un milieu eutrophe. C’est toutefois à l’embouchure de la rivière Yamaska que les plus fortes concentrations ont été observées et où des conditions hypereutrophes prévalaient.

Photo de la rivière Yamaska à l'été 2005 de couleur verdâtre conséquence d'une prolifération de cyanobactéries.

© Nathalie Gratton, Environnement Canada.
Couleur verdâtre de la rivière Yamaska causée par une prolifération de cyanobactéries en août 2005

Le phosphore contribue à la prolifération de phytoplancton comme les algues, lesquelles produisent de la chlorophylle a, un pigment associé à la photosynthèse. En 2005, la rivière Yamaska a connu un apport anormalement élevé de phosphore et d’azote qui a entraîné une prolifération importante de cyanobactéries, communément appelées algues bleues. Les concentrations de chlorophylle mesurées à l’embouchure de la rivière à ce moment atteignaient 257 µg/L, soit 10 fois plus que la moyenne observée généralement pour le mois d’août.

Concentrations de phosphore à l'embouchure de la rivière Yamaska en 2005
Concentrations de phosphore à l’embouchure de la rivière Yamaska en 2005

Concentrations de phosphore à l’embouchure de la rivière Yamaska en 2005 Le graphique montre les concentrations de phosphore observées à l’embouchure de la rivière Yamaska durant l’été 2005. Les concentrations sont d’environ de 0,06 milligrammes par litre les 18 et 25 mai, de 0,07 milligrammes par litre le 1er juin, entre 0,1 et 0,14 milligrammes par litre au mois de juin et entre 0,16 et 0,27 milligrammes par litre aux mois de juillet et aôut.

Les concentrations de phosphore varient au cours des saisons. Ainsi, les plus fortes concentrations sont observées en général au cours de l’été. Les épisodes de hausse des concentrations de phosphore correspondent souvent à une augmentation des matières en suspension provenant de l’érosion des terres agricoles ainsi que du débit des cours d’eau. C’est d’ailleurs ce qui a été observé dans la rivière Yamaska en 2005 où le débit moyen enregistré entre juillet et août, période correspondant à une hausse des concentrations de phosphore, a doublé pour atteindre 65 m3/s comparativement au débit de 30 m3/s enregistré entre mai et juillet.

Le saviez-vous? On estime qu’au moins 67 % du phosphore à l’embouchure de la rivière Yamaska proviennent de terres agricoles, 15 %, de rejets urbains, et 10 %, d’eaux usées rejetées directement dans le milieu aquatique. La quantité de phosphore exportée à l’embouchure de la rivière est passée d’environ 646 tonnes par année en 1994 à environ 329 tonnes par année en 2001-2003 (Berryman, 2008).

Le lac Saint-Pierre présente un apport excessif de phosphore et de matières en suspension en provenance de ses tributaires. En aval de l’embouchure des rivières Saint-François et Yamaska, il y a prolifération de cyanobactéries benthiques (Hudon et Carignan, 2008). La qualité de l’eau au lac Saint-Pierre est affectée aux endroits où les milieux riverains peu profonds reçoivent l’eau des tributaires qui drainent des régions agricoles, et plus particulièrement de ceux dont le débit est élevé.

Liens pertinents:

Références :

Berryman, D. 2008. État de l’écosystème aquatique du bassin versant de la rivière Yamaska : faits saillants 2004-2006. Québec, ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs, Direction du suivi de l’état de l’environnement. ISBN 978-2-550-53592-8 (PDF), 22 pages.

Conseil canadien des ministres de l’environnement. 2007. « Recommandations canadiennes pour la qualité des eaux : protection de la vie aquatique », Tableau sommaire, mis à jour en décembre 2007, dans Recommandations canadiennes pour la qualité de l’environnement. Winnipeg, le Conseil.

Environnement Canada. 2011. État et tendances de la qualité de l’eau pour les nutriments dans les bassins versants importants du Canada. Sommaire technique. 40 pages + annexe.

Environnement Canada. 2010. (2001, mise à jour du 17 aoùt 2010). Contaminants de l'eau (base de données). Contient des mesures de la qualité de l'eau, des concentrations de contaminants chimiques et bactériologiques, des teneurs en éléments nutritifs ainsi que les propriétés chimiques et physiques de l'eau de surface. Montréal, Environnement Canada, Direction générale des sciences et de la technologie, Monitoring et surveillance de la qualité de l'eau.

Hudon, C., et R. Carignan. 2008.« Cumulative impacts of hydrology and human activities on water quality in the St. Lawrence River (Lake Saint-Pierre, Quebec, Canada) », Journal canadien des sciences halieutiques et aquatiques, 65 : 1165-1180.

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