Substances nouvelles : résumé de l'évaluation des risques no 17179

Format PDF - 72 Ko

Décision réglementaire

En vertu de la partie 6 de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) [LCPE (1999)] et de son Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (organismes) [RRSN (O)], le ministre de l'Environnement et le ministre de la Santé ont évalué les renseignements concernant l'organisme déclaré et ont déterminé qu'il n'est pas soupçonné d'être nocif pour l'environnement canadien ni pour la santé humaine selon les termes de l'article 64 de la LCPE (1999)Note de bas de page1, lorsqu'il est fabriqué en vue d'être introduit dans une écozone suivant les méthodes de confinement et dans une écozone où il est indigène. Par conséquent, la fabrication à cette fin de cette souche d'une espèce Arcobacter est permise après le 2 août 2013.

Annexe du RRSN (O) : 1 (introduction suivant les méthodes de confinement et dans une écozone où le microorganisme déclaré est indigène)
Identification de l'organisme : souche d'une espèce Arcobacter
Déclarant : confidentiel
Date de la décision : 2 août 2013
Utilisation proposée : récupération du pétrole assistée par voie microbienne

Identification / Historique de la souche / Modifications génétiques

Le microorganisme déclaré est une bactérie présente à l'état naturel qui a été isolée en 2009 de l'eau de production se trouvant dans un réservoir de pétrole en Alberta. L'organisme a été identifié comme étant du genre Arcobacterd'après des critères tant phénotypiques que génotypiques. L'analyse de la séquence du gène de l'ADNr 16S a révélé des similarités, dont la plus grande était avec l'espèce Arcobacter Solar Lake, suivie par Arcobacter marinus et Arcobacter halophilus. L'analyse phylogénétique a comparé la souche déclarée avec la souche type de 16 espèces reconnues d'Arcobacter, avec l'espèce Arcobacter Solar Lake et avec deux autres souches de l'espèce Arcobacter provenant du même champ pétrolifère. L'alignement de multiples séquences a produit un arbre phylogénétique plaçant la souche déclarée dans un clade qui ne contenait que des isolats environnementaux. Les espèces restantes, dont des pathogènes connus, étaient regroupées dans deux autres clades.

Sur le plan phénotypique, la bactérie est définie comme étant un organisme halophile obligatoire, car la souche déclarée s'est révélée beaucoup plus tolérante au sel que la souche type d'A. marinus. À l'examen microscopique, les cellules sont des bacilles à Gram négatif, mobiles, incurvés ou hélicoïdaux qui ne présentent aucun signe de sporulation. Ces caractéristiques concordent avec celles des autres espèces du genre Arcobacter. Compte tenu de la caractérisation phylogénétique et phénotypique, le déclarant en conclut que cette souche d'une espèce Arcobacter est probablement une nouvelle espèce d'Arcobacter.

Examen des dangers

Danger environnemental

La souche déclarée ne sera utilisée que dans l'écozone et le type de milieu d'où elle a été isolée et elle ne subira pas de modifications génétiques. Il s'agit là de facteurs importants dans l'estimation du transfert horizontal des gènes de toute séquence préoccupante, puisqu'aucune nouvelle séquence ne sera introduite dans l'environnement. Il n'y a pas de données précises sur la possibilité de transfert horizontal des gènes pour cette souche d'une espèce Arcobacter, mais rien n'indique que la possibilité soit plus importante pour celle-ci que pour toute autre espèce d'Arcobacter présente naturellement dans l'environnement.

On ignore le potentiel de pathogénicité ou de toxicité de la souche déclarée envers les espèces terrestres et aquatiques non-humaines. Les espèces d'Arcobacter occupent des milieux d'une grande diversité et ont un potentiel très varié d'être un pathogène pour les mammifères (Collado et Figueras, 2011). Dans la littérature, aucun document ne fait état d'infections qui pourraient être attribuables à une espèce du clade auquel la souche déclarée appartient. En outre, le déclarant a constaté que les membres de ce clade sont moins mobiles que les souches types des espèces pathogènes connues d'Arcobacter. Contrairement à ces espèces pathogènes, les membres du clade de la souche déclarée n'envahissent pas les cellules mammaliennes in vitro (Levican et coll., 2013).

Cependant, cette souche d'une espèce Arcobacterappartient à une nouvelle espèce qui n'a pas encore été caractérisée et d'un genre renfermant des espèces pathogènes. Aussi, elle a été déclarée aux termes de l'annexe 1 avec méthodes de confinement, annexe qui ne comporte pas d'exigences relativement aux résultats d'analyse des effets écologiques sur les organismes aquatiques et terrestres, ce qui laisse planer une certaine incertitude. En conséquence, le risque que le microorganisme déclaré présente un danger envers l'environnement est jugé modéré.

Danger pour la santé humaine

Certaines espèces d'Arcobacter comme A. cryaerophilus, A. skirrowii et, le plus souvent, A. butzleri sont des pathogènes humains émergents qui ont tous été associés à une entérite et, occasionnellement, à une bactériémie (Snelling et coll., 2006). Les mécanismes de pathogénicité et de virulence des espèces d'Arcobacterdemeurent mal compris, mais des chercheurs ont observé l'adhésion, l'envahissement et la cytotoxicité d'espèces d'Arcobacter dans des études in vitro (Collado et Figueras, 2011). Certaines caractéristiques de l'hôte telles que l'âge et l'état immunitaire ont probablement aussi un rôle important à jouer dans la gravité des infections par Arcobacter (Collado et Figueras, 2011; Shah et coll., 2011). L'analyse phylogénétique place les trois espèces mentionnées ci-haut dans un clade différent de celui de la souche déclarée. Dans une étude sur la pathogénicité et la toxicité orale aiguë réalisée avec la souche déclarée, aucune mortalité ni aucun signe clinique lié au traitement n'ont été observés durant la période de l'étude, ce qui a permis de conclure que cette souche d'une espèce Arcobacter est non toxique, pas infectieuse et qu'elle n'est pas un pathogène. Les essais de sensibilité aux antibiotiques ont révélé que la souche déclarée est sensible à certains antibiotiques d'importante clinique. On ne s'attend pas à ce que l'utilisation de cette souche d'une espèce Arcobacter cause des effets nocifs pour la population générale. Le risque pour la santé humaine a donc été jugé faible.

Examen des aspects liés à l’exposition

La propriété et la responsabilité de la souche déclarée demeureront celles du déclarant et ce dernier en sera l'unique fournisseur dans le cadre d'un service offert aux exploitants de champs pétrolifères. L'introduction de cette souche d'une espèce Arcobacter dans l'environnement canadien sera limitée aux réservoirs de pétrole dans l'écozone des Prairies, où elle est indigène. Cette utilisation est conforme au champ des activités qui peuvent avoir lieu dans le cadre d'une déclaration aux termes de l'annexe 1 avec méthodes de confinement.

Une petite quantité congelée de la souche déclarée sera importée de l'établissement du déclarant aux États-Unis pour sa fabrication dans une usine de fermentation au Canada sous la supervision du déclarant. Les renseignements fournis indiquent que la fabrication respectera au minimum les exigences physiques et opérationnelles du niveau de confinement grande échelle 1 énoncées dans la 3e édition des Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire publiée par l'Agence de la santé publique du Canada. Par conséquent, les mesures sont en place pour prévenir le rejet du microorganisme dans l'environnement durant la fabrication et pour assurer l'intégrité de la culture. Tous les déchets biologiques produits durant la fermentation seront inactivés par autoclavage ou par traitement avec une solution d'eau de Javel ou d'éthanol à 70 %.

Le bouillon de fermentation contenant cette souche d'une espèce Arcobacter sera injecté dans des puits de pétrole par moyen d'un tuyau en acier durant plusieurs heures et jusqu'à une profondeur d'environ 2000 mètres. Un apport périodique de nutriments assurera le maintien de la population de la souche déclarée dans le réservoir. Une fois les nutriments épuisés, la quantité de la souche déclarée devrait diminuer et atteindre les niveaux naturels correspondant à son habitat indigène. Cette souche a aussi la capacité de se fixer à des surfaces solides sous forme de biofilm dans des milieux riches en hydrocarbures. Le puits de pétrole lui-même agira comme un dispositif de confinement du microorganisme, car les champs pétrolifères utilisent un système de traitement de l'eau fermé grâce auquel le pétrole est retiré de l'eau de production sortant du puits. L'extraction du pétrole de l'eau s'effectue par traitement thermique à des températures auxquelles cette souche d'une espèce Arcobacter ne peut survivre, ce qui réduit énormément les possibilités de rejets dans l'environnement à partir des puits. Les conditions normales prévalentes dans l'écozone des Prairies, hors du champ pétrolifère, ne correspondent pas aux conditions requises pour la croissance optimale de la souche déclarée. Dans le cas peu probable d'une défaillance des mesures de confinement, on ne s'attend pas à ce que cette souche d'une espèce Arcobacter survive dans l'environnement ni qu'elle y persiste à des concentrations élevées. Le risque d'exposition environnementale et humaine à cette souche d'une espèce Arcobacter est par conséquent jugé faible.

Conclusion de l’évaluation des risques / Décision réglementaire

Cette souche d'une espèce Arcobacter est une bactérie présente naturellement dans l'environnement qui n'est pas considérée comme étant un pathogène chez les humains, les animaux ou les végétaux. Une étude sur la toxicité aiguë n'a révélé aucun effet nocif et les analyses phylogénétiques placent la souche déclarée dans un clade différent de celui des espèces d'Arcobacter pathogènes connues. Le microorganisme déclaré sera fabriqué dans une usine au Canada en conformité avec les exigences de niveau de confinement grande échelle 1. Cette souche d'une espèce Arcobacter sera introduite dans la même écozone que celle où elle a été isolée pour la première fois, et elle sera confinée dans des réservoirs de pétrole souterrains. Compte tenu de l'utilisation proposée, les évaluations de risques menées par Environnement Canada et Santé Canada permettent de conclure que cette souche n'est pas nocive pour l'environnement canadien ni pour la santé humaine et qu'en conséquence, elle ne satisfait à aucun des critères énoncés à l'article 64 de la LCPE (1999). Ce microorganisme n'est pas admissible pour ajout à la Liste des substances intérieures d'après les résultats de cette évaluation des risques.

Références

Collado, L., Figueras, M.J. 2011. Taxonomy, epidemiology, and clinical review of the genus Arcobacter. Clin. Microbiol. Rev.24:174-192.

Levican, A., Alkeskas, A., Gunter, C., Forsythe, S.J., Figueras, M.J. 2013. Adherence to and invasion of human intestinal cells by Arcobacter species and their virulence genotypes. Appl. Environ. Microbiol.79:4951-4957.

Shah, A.H., Saleha, A.A., Zunita, Z., Murugaiyah, M. 2011. Arcobacter - an emerging threat to animals and animal origin food products? Trends Food Sci. Technol. 22:225-236.

Snelling, W.J., Matsuda, M., Moore, J.E., Dooley, J.S.G. 2006. Under the microscope:Arcobacter. Lett. Appl. Microbiol. 42:7-14.

Détails de la page

Date de modification :